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Affiche - Programme

 Le pouvoir d’injonction du juge administratif

La loi du 8 février 1995, vingt ans après

Colloque organisé à l’Université d’Orléans le vendredi 6 février 2015

 

 Présentation

 

A l’instar des lois du 31 décembre 1987 et du 30 juin 2000, la loi du 8 février 1995 attribuant au juge administratif un pouvoir d’injonction marque sans conteste une étape décisive et une véritable césure dans l’histoire de la juridiction administrative et du contentieux administratif français. Par-delà même la remise en cause d’une jurisprudence séculaire, qui interdisait jusque-là au juge administratif l’exercice de tout pouvoir de commandement à l’encontre des personnes morales de droit public, cette loi a incontestablement donné à la justice administrative un nouveau visage. Elle a également modifié en profondeur les relations du juge administratif et de l’administration, en contraignant celui-ci à s’interroger sur les suites que comportent ses décisions afin de fournir à la personne publique concernée les clés de compréhension nécessaires pour se conformer aux exigences de la chose jugée.

Outil décisionnel moderne, qui n’apparaît pourtant pas, historiquement, totalement étranger aux pouvoirs du juge administratif, l’injonction contribue à renforcer aujourd’hui l’efficacité et l’effectivité de ses sentences, au stade même du jugement et après constat de l’inexécution de ses décisions. Exercé ex ante et concomitamment à une décision juridictionnelle principale, le pouvoir d’injonction préventif permet en particulier au juge de se projeter directement sur les implications de son jugement, prolongeant ainsi sa mission première par la prise en compte immédiate du souci d’exécution.

 La loi du 8 février 1995 a sans aucun doute marqué tout à la fois un aboutissement et un point de départ. Consacrant dans toute sa portée, après l’introduction de l’astreinte en 1980 et l’attribution d’importantes prérogatives au juge du référé précontractuel au début des années 1990, le pouvoir de prononcer des injonctions en exécution de la chose jugée, elle a également ouvert la voie à des évolutions qui n’étaient sans doute guère perceptibles au moment de son adoption et qui ne sont, pour certaines, pas encore achevées. Elle a ainsi connu d’importants prolongements en jurisprudence et dans les textes, à travers une diversification des sources et des manifestations du pouvoir d’injonction et l’utilisation audacieuse par le Conseil d’Etat, en dehors du cadre législatif initial, de techniques très proches d’un authentique pouvoir d’enjoindre. A l’origine d’une véritable révolution culturelle dans les prétoires, la réforme de 1995 porte par ailleurs la marque d’un indiscutable renouveau du contrôle juridictionnel, guidé par le souci d’adapter la justice administrative aux besoins modernes du XXIe siècle. Elle n’a, à cet égard, pas été sans impact sur l’office du juge administratif, particulièrement dans le contentieux de l’excès de pouvoir, dans lequel les juridictions, traditionnellement frappées d’une sorte de capitis deminutio, se limitaient traditionnellement à un rôle mécanique et négatif de censeur et de contrôleur de l’activité des personnes publiques. Invitant le juge à faire œuvre de justice distributive en explorant, davantage que par le passé, les suites qu’impliquent ses décisions d’annulation, la loi de 1995 a ainsi imprimé au contrôle exercé une dimension positive et constructive, générant par ailleurs une forme de subjectivisation du contentieux de la légalité, par une protection juridictionnelle accrue des droits des justiciables, et renouvelant par là-même les interrogations sur la pertinence même de la distinction des contentieux. Elle s’inscrit à cet égard dans le « changement de paradigme » de la justice administrative en Europe, parfaitement présenté par le grand juriste espagnol Eduardo Garcia de Enterria : naguère organe de contrôle de l’action de l’administration, la juridiction administrative se veut aujourd’hui davantage protectrice des droits subjectifs des administrés.

 Ce colloque organisé à l’Université d’Orléans le vendredi 6 février 2015 par le Centre de recherche juridique Pothier se donne ainsi pour objectif de célébrer le vingtième anniversaire d’une loi qui, tout en répondant aux nouvelles attentes du corps social, n’aura pas été sans incidence sur la figure du juge et la physionomie d’ensemble de la justice administrative. Il sera l’occasion d’une confrontation de regards croisés émanant d’universitaires, de représentants de la juridiction administrative et de praticiens du droit, autour de communications orales et de débats faisant appel tout à la fois à l’expérience du terrain, à la réflexion théorique, à l’histoire et à la comparaison des droits. Une table ronde consacrée à la question de l’évolution des rapports entre le juge administratif, l’administration et les citoyens clôturera la matinée. La mise en perspective du matin, dédiée à la gestation et au bilan de la loi du 8 février 1995, sera par ailleurs prolongée d’une après-midi d’étude consacrée à des questions plus prospectives tournant autour de l’application du pouvoir d’injonction.

   

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